Zone de Texte: Vicaire Général du Diocèse de Belley (1823-1836) 
Sous le Concordat (1801) l’Ain fut presque totalement rattaché à l’Archevêché de Lyon, sous l’autorité du Cardinal Fesch.
En 1823, la Restauration recréa à nouveau le diocèse de Belley coïncidant avec le département de l’Ain.
Son nouvel Evêque fut Monseigneur DEVIE, né en 1767 à Montélimar, Vicaire Général du diocèse de Valence, sacré le 15 juin 1823.
I — L’Abbé Delacroix choisi comme premier Vicaire général.
Tout naturellement, Monseigneur Devie s’adressa à l’Archevêché de Lyon pour connaître parmi le clergé diocésain le prêtre le mieux à même de la seconder comme Grand Vicaire.
En l’absence du Cardinal Fesch réfugié à Rome depuis 7 ans, le diocèse de Lyon était dirigé avec compétence et autorité par les Vicaires Généraux Courbon et Bochard
M. Bochard, originaire de l’Ain et ancien curé de Bourg était le mieux placé pour intervenir dans ce choix. Il proposa Nicolas Augustin Delacroix, curé de St Bruno, ancien curé de Fareins (01) situé dans le nouveau diocèse et surtout pour la filiation au sein de la Société des « Pères de la Croix de Jésus » entre son fondateur et le premier « Préposé général » de la Société.
C’est pour cela que dès 1823, N.A Delacroix fut le premier nommé au poste de Vicaire Général du nouveau diocèse de Belley.
II — Difficultés dès le début de son nouveau ministère.
La mort du Pape Pie VII en 1823 fut suivie par l’élection de Léon XII en 1824 qui, à la demande du gouvernement de la France, nomma à l’archevêché de Lyon un administrateur apostolique : Monseigneur de Pins, pour palier à l’exil du cardinal Fesch toujours Archevêque de Lyon.
M. Courbon décédé le 9 février 1824 n’eut pas besoin de faire allégeance à Monseigneur de Pins, quant à M. Bochard, dernier fidèle inconditionnel de Monseigneur Fesch, il s’opposa ouvertement à la nomination d’un Administrateur Apostolique à Lyon ; ceci alla jusqu’à sa démission après avoir fait des excuses et l’obligation de se retirer sur ses terres dans le diocèse de Belley.
Cette arrivée de M. Bochard, lourdement sanctionné et abandonné de tous ses anciens prêtres, fut funeste à Nicolas Augustin Delacroix, connu partout comme le fils spirituel de ce Grand Vicaire, éminent théologien du diocèse de Lyon et limogé dans le diocèse même où Nicolas Augustin assurait pour la première fois une responsabilité identique.
Cette présence fut d’autant plus douloureuse que par deux fois (en 1824 et surtout en 1826) le pape Léon XII suite à l’avis de nombreux détracteurs, demanda à Monseigneur Devie d’enquêter sur le comportement de M. Bochard. Il donna au Saint-Siège l’assurance que le calme était revenu et les torts oubliés car « fauteur ni d’hérésie ni de schisme » comme beaucoup l’accusaient.
Mais le malaise persista jusqu’à la mort en 1834 de M. Bochard, avec en plus son testament contesté par ses héritiers, soit durant tout le ministère au diocèse de Belley de l’abbé Delacroix.
III — Une caricature sur l’équipe dirigeante du diocèse de Belley, « résumé humoristique », mais assez représentatif de l’équipe.
Une caricature non en notre possession circulait, réunissant les quatre dirigeants du diocèse de Belley, à savoir :
L’Evêque, Monseigneur Devie
Le premier Vicaire Général, Nicolas Augustin Delacroix
Le deuxième Vicaire Général, M. Greppo, érudit, passionné d’études archéologiques, membre de l’académie de Lyon, connu par un essai sur le système hiéroglyphique de Champollion le jeune (1790-1832)
Le bras droit de l’Evêque , M. Ruivet, appelé pour sa haute connaissances des hommes et du diocèse. Homme très actif, il était partout et sur tous les secteur ce qui le fit surnommer « le grand brasseur ».
Mais revenons à notre caricature :
Tout ce beau monde est rassemblé sous un noyer, M. Ruivet secoue l’arbre de toutes ses forces, tandis que Monseigneur Devie reçoit les noix dans un pan de sa soutane et se précipite en même temps pour ramasser 
celles tombées à terre. Non loin se trouve M. Delacroix qui prie avec M. Greppo qui fume sa pipe.

Le caricaturiste du site, en quelques traits acérés nous propose sa version de la scène


Prier c’est bien, mais est-ce suffisant pour un grand Vicaire ?
En réalité, N.A Delacroix souffrait d’une difficulté inhérente à sa nature et pourtant indispensable à un Monseigneur, qui était l’absence des avantages accordés à tout bon orateur. Il manquait de mémoire, de souffle, on dirait plutôt de « coffre » et aussi d’assurance et d’aisance pour pouvoir briller dans la prédication.
Aussi s’adonna-t-il à des secteurs trop souvent dédaignés par les grands vicaires, il passait de longues heures au confessionnal ou à visiter les malades, découvrir les pauvres et mêler ses charités à toutes sorte de bonnes œuvres sans y associer son nom ni sa prédication, tout cela en plus des fonctions administratives imposées par sa charge. Il habite l’évêché, circulant toujours en simple soutane noire. Tout le rapprochait du Saint Curé d’Ars, mais Belley était loin d’Ars et Monseigneur Devie se réserva toujours le secteur d’Ars.
IV — « Violon d’Ingres » de notre ancêtre.
Le froid, la pluie, la canicule, les loups et les moustiques ne purent l’arrêter et il parcoure toutes les zone montagneuses du diocèse avec le secrétaire de Monseigneur Devie, M. Depery, son cadet de 17 ans, compagnon de toutes les randonnées et le porteur de la « hotte » qui recueillait toutes les découvertes. L’enfant d’Azolette se retrouvait dans la joie simple et la fatigue vivifiante de l’effort en montage avec son jeune ami qui restera son lien avec la montagne et partagera son amour de la nature.
Autre passion, souvenir inaliénable de sa première année de médecine à Paris, fut son amour de l’histoire naturelle qui le rendit naturalise : entomologiste, herboriseur ou plus simplement jardinier et horticulteur à l’évêché.
Cette passion, il la fit partager à son neveu Louis Delacroix, qui gérait sa propriété de Regnié en Beaujolais, reçut le 16 août 1834 à la fin de son séjour à Belley, cette épitre sur le « melon et la courge » qui montre cet aspect Azoletton de notre ancêtre qui ne le quittera jamais.
...« d’après la description que tu me donnes, sous le nom de Boule de Siam, c’est bien le nom qui convient. C’est de la famille des cantaloups qui a pris chez vous un développement remarquable car il n’est que de grosseur médiocre ordinairement…
J’ai recueilli cette année d’excellentes graines de toutes les variétés du melon « sucrin de Tours », bien étiquetées, j’en suis sûr car j’ai fait moi-même cette opération… Ma culture, cette année, a réussi à merveille. J’ai eu 100 melons tous bons, seulement trois médiocres et en plus une huitaine de melons « malte d’hiver » qu’il faudra aussi implanter chez vous, car ils font plaisir en novembre et décembre.
Les courges que tu as planté à Regnié, qui sont si bien sont connues sous le nom de « pâtisson » ou « Bonnet d’Electeur , cela vaut mieux que la courge ou potiron, nous en avons ici toute l’année d’une récolte à l’autre, en se conservant à merveille tenues au sec sur des tablettes. Le mieux, c’est de les ranger en rayons dans la cuisine, cela ne dépare pas la pièce.
Voila mes longues observations sur les melons et les courges... »
C’est au milieu de cette activité diocésaine atypique et contrastée que le 30 novembre 1836, Nicolas Augustin Delacroix reçoit du Nonce la nouvelle de sa nomination au siège de Gap, s’étendant sur « au moins deux cents paroisses » dit-on, pour succéder à Monseigneur Arbaud, Evêque du nouveau diocèse de Gap, comme celui de Belley, depuis 1823 et adulé de tous ses diocésains.
Nicolas Augustin Delacroix fut sacré Evêque de Gap le 25 juillet 1837, dans l’église de Brou, à côté de Bourg, diocèse de Belley, par Monseigneur Devie et intronisé à Gap le 14 septembre 1837, (jour de l’exaltation de la croix).
Doit-on voir dans ce choix de date un clin d’œil du diocèse à son futur Evêque ?