Zone de Texte: Avec le Cardinal Fesch, Primat des Gaules 

Le cardinal Joseph Fesch (1763-1839), ayant joué un rôle prépondérant tout au long du ministère de l’abbé Delacroix d’azolette, au diocèse de Lyon, nous ne pouvons laisser dans l’ombre son histoire pendant la Révolution, car si elle peut laisser douter du cardinalat qui suivit elle révèle la qualité de ce primat qui fit plus pour l’Eglise de Lyon en 12 ans, de 1802 à 1814, qu’aucun des primats antérieurs.
Son neveu Bonaparte, lui doit sa formation morale et déiste. Celui-ci n’oublia pas l’assistance fidèle de son oncle Joseph et il la lui rendit largement. Dès 1795, il lui procure un poste d’intendant aux armées.
C’est à partir de cette époque que de défroqué du chapitre d’Ajaccio, pendant la Révolution, il devint un bourgeois nanti, un trafiquant habile, un propriétaire cossu et amateur d’art.
Le Concordat, signé le 15 juillet 1801 avec le pape Pie VII et proclamé à Paris à Pâques 1802 par un « Te Deum » solennel, exigeait des relations suivies avec le Saint Siège. C’est le premier consul connaissant pratiquement seul les antécédents de prêtrise de son oncle qui le choisit comme ambassadeur.
Possesseur d’un luxueux hôtel à Paris, très mondain mais sans écart de conduite, ni « ombre galante pouvant ternir son intimité », converti par une retraite prêchée par l’abbé Emery, supérieur de Saint Sulpice, il reprend le bréviaire et redit la messe abandonnée depuis 9 ans.
Rien ne s’oppose alors pour qu’en l’espace de 6 mois le légat de Pie VII le nomme le 15 juillet 1802 au siège libre de Lyon, le sacre à Notre Dame le 15 août, l’intronise à la Primatiale le 2 janvier 1803 et le crée cardinal en février. En avril, il est nommé par son neveu ambassadeur auprès du Saint Siège. 
Par la force due à la Grâce il ne se laissa jamais griser par les honneurs ni par les émoluments fastueux qu’il consacra à l’art et à son diocèse.
Une intelligence sans défaut, permettant l’union des deux clergés séparés à la Révolution, le rétablissement total du culte, la création des petits séminaires avec 1200 élèves et du grand séminaire de Saint Irénée avec 80 étudiants en théologie, les ordinations, les confirmations , l’unité de ses vicaires généraux… Tout en éprouvant peine et angoisse pour l’Eglise et son chef le Pape, il considère tous les problèmes sous l’aspect du « rendement » diocésain. Aucune insouciance ni légèreté dans sa conduite mais l’application consciencieuse et efficace d’un parfait « fonctionnariat » religieux, abandonnant la marche du reste du monde, quand il n’y peut rien, aux bons soins de la Providence. 
Il s’intéressa d’abord à l’abbé Delacroix en l’affectant à la difficile paroisse de Fareins, où il se rendit compte qu’il avait en lui, un prêtre capable de diriger les séminaires (petits et grand) œuvre dominante de son magister.
Pour cela, il l’attacha à sa personne non pour en faire un disciple voué aux honneurs, mais profiter de sa douceur et sa haute conscience pour en faire son confident.
Le Cardinal digne oncle de son neveu l’Empereur, était sujet à de fréquents accès de colère. Monsieur Delacroix par ses prévenances délicates et des observations faites à point, calmait le Primat des Gaules, exerçant sur son âme une sorte d’autorité et lui épargnant une foule de peines plus ou moins cuisantes.
On dit même que Monseigneur Fesch en fit son confesseur.
Pressentant dans ce prêtre, bon, savant et distingué une « graine d’Evêque » comme l’on dit souvent irrespectueusement, en mai 1813 il effectue avec lui, pendant plus d’un mois une tournée de confirmations qui se termina par une visite, en Azolette, au Plumet.
70 000 confirmations en 36 jours 
Fin Août 1813, le Cardinal Fesch, entreprit une tournée de confirmation. En l’absence de ses grands vicaires, il prit avec lui l’abbé de la Croix, à cette époque directeur du Séminaire Saint Irénée. Sans doute pressentait-il son avenir et dans cette espérance, il lui faisait faire l’apprentissage du grand ministère épiscopal qu’il devait un jour si bien remplir.
Comme rapporte l’abbé Lyonnet : « son éminence commença par Villefranche, Belleville, Beaujeu, Fleurie et toutes les paroisses du bas-Beaujolais. De là, elle gravit la montagne et visita le Bois d’Oingt, Saint Nizier d’Azergues, Saint Just d’Avray, etc. Rien ne fut aussi imposant que son entrée à Tarare, dans sa grande voiture aux aigles et armes de l’Empereur. Il n’y eut que Saint Symphorien de Lay qui put rivaliser de zèle et d’empressement avec les habitants de cette ville industrielle.
Sa plus grande joie était de donner la communion aux fidèles qu’il distribuait seul. Pour cela, il avait fait faire un grand ciboire en vermeil d’une forme particulière, ressemblant à une corbeille allongée et pouvant contenir trois à quatre mille hosties. Placé sur l’autel le prélat y venait pour garnir un petit ciboire en vermeil. A la fin de la messe, le cardinal donnait le sacrement de confirmation à des milliers de fidèles préparés par leurs pasteurs. »
Il passa par l’abbaye de Pradines où il occupa le logement qu’il s’était réservé dans les dépendances du monastère. Le cardinal ne se méprenait pas sur l’avenir de l’empire même si le lendemain à Roanne il apprit la victoire éclatante de l’Empereur sous les murs de Dresde et fit le dernier mandement pour les succès de son seigneur et maître, à la demande de l’impératrice régente. Rien ne trahissait ses impressions et l’entourage religieux, comme le reste du diocèse, attendait toujours une forme de réprobation qui ne venait pas. Une désaffection de plus en plus profonde des ouailles envers le pasteur était visible.
« Monseigneur dirigea ensuite sa course du côté de Charlieu, petite ville qui fût autrefois le siège d’une abbaye célèbre. Il confirme le premier jour les habitants de la ville et le second ceux des paroisses environnantes.
Le prélat ne revient à Lyon que le 29 ou 30 septembre. Son absence aura été de 35 à 36 jours. Il avait confirmé pendant cette tournée 70 000 personnes. 
N-A. De la Croix ayant compté jour par jour les bulletins de confirmation, aimait montrer à ses amis les calculs qu’il avait fait sur son calepin de voyage. »
En rentrant sur Lyon, ils passèrent sans doute par Azolette car il est inscrit dans le livre de raison de Paul Perroy (Tome I, p.45) : «  le vieux logis du Plumet reçut au moins une fois la visite de son éminence ». Compte tenu de son exil à Rome dès 1814, il semble bien que c’est à la fin de cette tournée de confirmations, qu’il se rendit à Azolette avec Nicolas-Augustin dans sa grande voiture aux aigles et armes de l’empereur tirée par quatre chevaux blancs.
A la fin de l’année scolaire 1813-1814, Napoléon abdique et part pour l’île d’Elbe, entraînant le premier exil de Fesch à Rome, jusqu’aux cent jours.
L’arrivée tant espérée de Louis XVIII qui suivit, mit tout Lyon en liesse et modifia les esprits. Tout changea au Grand Séminaire. Le nom et sans doute l’atavisme familial de son directeur plus orienté vers la Royauté que l’Empire fut bien perçu par les futurs prêtres eu égard à ces changements politiques. Dans l’allée des tilleuls, à Saint Irénée, on parla politique plus que théologie… 
Un an plus tard, Napoléon revint d’Elbe et le cardinal Fesch de son exil à Rome. Il passa trois jours à Lyon et tint à effectuer une visite à son grand séminaire de Saint Irénée conquis par l’esprit ultraroyaliste. Il voulait affirmer qu’il restait le patron du diocèse de Lyon pour lequel il donna toute sa vie, sinon par sa présence effective tout au moins par son autorité, sa fortune et son cœur.
Mission impossible. Tous les séminaristes haïssaient Napoléon ce tyran traité encore en héros et tous refusaient de chanter dans la chapelle, selon la prescription qui avait été faite, le « Domine, salvum fac imperatorem Napoleonem… »
Aussi à l’arrivée du cardinal, devinant les motifs de sa visite, la plupart se sauvent dans leur chambre, quelques-uns restent à l’écart avec une attitude provocatrice. C’est au directeur que revint la tâche de rassembler ce petit nombre. Le cardinal sentant que le futur clergé de son diocèse « chéri de son cœur » risquait de lui échapper, essaye de les apaiser par des paroles de prudence mais aussi d’autorité. Sans succès, il se retira désespéré.
Un séminariste exalté pour clore cette rencontre trouva judicieux d’écrire à la craie, sur la porte de la voiture du prélat le cri chéri depuis un an de «  Vive le Roi » de sorte que Monseigneur Fesch traversa toute la ville avec cette inscription, à ses yeux pour le moins séditieuse 
Pendant les 100 jours, la famille De la Croix d’Azolette participe à l’histoire de France.
Au retour d’Elbe (1er mars 1815), alors que le roi Louis XVIII, toujours flegmatique se tient silencieux ; toutes les troupes envoyées pour défendre la patrie se rallient successivement à Napoléon. 
Aussi, le roi las et fatigué, ayant pris soin de faire porter à l’étranger les joyaux de la couronne fuit dans la nuit du 19 au 20 mars 1815 le palais des Tuileries, vers la ville de Gand. Accompagné de tous ses gardes du corps dont faisait partie Jean-Marie II Delacroix d’azolette, frère aîné de l’abbé Delacroix.
Dès le 20 mars au matin, Napoléon entre à Paris, mais le 18 juin, ses rêves s’envolent avec la défaite de Waterloo. Il abdique le 22 juin et est exilé à Sainte Hélène le 7 août.
Le 8 juillet, Louis XVIII est de nouveau à Paris et par ordonnance du 27 décembre 1815, Jean-Marie II Delacroix reçoit le 1er titre de noblesse « écuyer », décoré donc du grade de Chevalier de la Croix d’Azolette, en récompense de ses services et de son dévouement en la personne de sa majesté Louis XVIII.
Pendant ce temps, son jeune frère, l’abbé Delacroix, en tant que Directeur du grand Séminaire de Saint Irénée, déploie sa persuasion sur la troupe des futurs prêtres du diocèse de Lyon, Tous révoltés contre l’Empereur déchu et la famille impériale. Il incarne la seule manière pour maîtriser la fougue et l’agressivité des séminaristes devenus ultra royalistes par sa direction pacifique et douce. Restant ferme et équilibré, il permit au Cardinal Fesch de conserver toute son autorité sur les futurs prêtres de son diocèse.
Exilé une deuxième fois en août 1815 de son diocèse à Rome, le Cardinal pense sans cesse à Lyon.
Au fond de lui-même, il sait qu’il n’y retournera jamais et mourra en exil, car depuis le 2 janvier 1816, sous la royauté de Louis XVIII, à l’unanimité, les députés adoptent la loi de proscription de France des Bonaparte.
Or, Monseigneur Fesch possède sur ses propres deniers, l’ensemble de la propriété des Chartreux à Lyon, à côté de Saint Bruno, également les séminaires de l’Argentière, de Verrière et d’Alix et il tient à ce que ces biens qui lui sont propres ne soient pas saisis par le gouvernement du roi Louis XVIII et qu’ils reviennent à la destination qu’il a toujours souhaité.

Avec le Cardinal Fesh 
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